L’idée initiale était bonne. On fusionne tous les producteurs indépendants de wagons de chemin de fer de Amherst en Nouvelle-Écosse à Fort William en Ontario (actuellement Thunder Bay). On offre aux anciens actionnaires à la fois des actions ordinaires et de l’argent. On hypothèque les usines pour trouver l’argent. Ces capitalistes montréalais, de leurs locaux du Transportation Building, situé à l’angle des rues Saint-François-Xavier et Notre-Dame, contrôlent ce nouveau monopole grâce à leurs actions préférentielles. Pendant cinq années, les profits sont aussi bons que l’idée de départ.

Personne n’a prévu une guerre de l’ampleur de celle qui sévit en Europe. Les compagnies de chemin de fer n’achètent plus de wagons. On assiste à une flambée des prix des matières premières. Les créanciers britanniques surveillent toujours leurs intérêts. Les pertes dépassent le demi-million de dollars. La solution : se recycler dans la production de munitions. La Russie impériale a déjà commandé cinq millions d’obus à la compagnie. Les profits ne tarderont à venir; si ce n’est pas l’an prochain, 1917 sera certainement une année rentable. En effet, il y a des séquelles à 1917 : ce sont les travailleurs de la Canadien Car à Amherst qui déclencheront la première grève générale de 1919.

La Canadian Car demeurera une société industrielle significative jusqu’aux années 1960, quand les chemins de fer canadiens entreront dans une longue période de déclin à cause de l’importance accrue du camionnage. Quant au Transportation Building, il sera démoli en 1963 pour faire place au nouveau siège social de la Banque canadienne nationale.