Trois ou quatre fois par semaine, M. Watson, directeur général de la Montreal Rolling Mills, quitte ses bureaux de la rue Saint-Paul pour visiter la grande fabrique de fer située le long du canal Lachine sur la rue Notre-Dame, près de Saint-Henri. Ce n'est pas tant la fabrication que la gestion que l'intéresse. Car la Montreal Rolling Mills est un nouveau genre d'entreprise : une société à capital-actions où le risque de pertes pour les actionnaires est légalement limité aux montants directement investis. Malheureusement, le risque couru par les 400 employés n'est pas aussi limité. Dans cet enfer de ferronnerie, les dangers de perdre un doigt, un œil, une section de bras ou de jambe sont grands, d'autant plus que l'entreprise connaît une forte croissance. Depuis cinq ans, on a augmenté le capital-action de 150 % et presque triplé le chiffre d'affaires, qui frôle maintenant les 700 000 dollars. Cette croissance explique l'embauche en 1873 du jeune William McMaster, futur magnat de l'industrie canadienne de l'acier.
En mai 1868, les quincailleurs en gros Morland & Watson fondèrent le Montreal Rolling Mills Company Limited. Cette nouvelle entreprise finança l'achat de l'ancienne usine de clous de Mansfield Holland afin de la fusionner à la manufacture de scies et de haches de la Morland & Watson, fondée dans les années 1850. Avec l'aide de William Molson, président de la banque Molson, et de Peter Redpath, fils du magnat du sucre, ils réussirent à ramasser un capital-action de 200 000 dollars.
Malgré la longue dépression économique qui débute en 1873, le Montreal Rolling Mills continuera d'accroître ses activités. William McMaster assumera la direction à partir de 1888. Au cours des années 1890, sous la présidence d'Andrew Allan, le siège social sera installé au Temple Building, 185 rue St Jacques. Au tournant de siècle, les liens avec la banque de Montréal se renforceront. Le directeur général de la banque Sir Edward Clouston assumera la présidence, alors que la banque financera l'achat de deux concurrents montréalais, le Pillow-Hersey et le Hodgson Iron and Tube Company. Cette concentration régionale ne suffira pas et Max Aitken englobera la compagnie dans sa Steel Company of Canada en 1909.
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