La livraison rapide des petits paquets reste toujours au centre des affaires, même en temps de guerre. Mais avec tous ces jeunes officiers canadiens qui découvrent Londres et Paris, la circulation de mandats d'argent et de chèques étrangers prend une importance inusitée. Filiale de la toute puissante CPR, avec une capitalisation de deux millions de dollars et un chiffre d'affaires de cinq millions, la Dominion Express contrôle près de la moitié de l'industrie canadienne de livraison de petits colis. Son seul concurrent important est la Canadian Express, filiale du Grand Tronc et affiliée à l'American Express. Certains pensent même que l'édifice du Dominion Express fut construit en guise de réponse à la construction de l'imposant édifice du Grand Tronc sur la rue McGill. Mais c'est plutôt le contraire, avec une position si dominante, la croissance de la Dominion Express passe par la diversification. Ce nouveau gratte-ciel de la rue Saint-Jacques, à l'ouest de la Banque de Montréal, construit à un coût de 700 000 $, est un immeuble à revenus. Même si on y retrouve la billetterie de la CPR et les bureaux régionaux de la Dominion Express, le siège social de la compagnie est à Toronto. On vise les locataires fortunés, un club privé s'installe d'ailleurs au dernier étage. Le pari est gagné quand le Crown Trust et le Montreal Security Corp s'y installent dès l'ouverture en mai 1912.
Incorporée en 1873, la Dominion Express dont le siège social est alors à Winnipeg ne commence ses opérations qu'à l'été de 1882. Car la première tentative pour former la CPR ayant échoué en 1873, il fallait attendre une dizaine d'années avant qu'un chemin de fer ne fonctionne. La Dominion Express ouvre 11 agences le long des 442 miles de voie ferrée entre Rat Portage et Broadview dans l'Ouest canadien. Dès 1883, après une entente avec les bateaux de la Vickers Express, on assurait une liaison entre Winnipeg et Toronto, où le siège social fut déménagé l'année suivante. À Montréal, dès 1898, la compagnie faisait construire de grandes étables, rue Latour, sur le site de l'actuelle place Bonaventure. Quelques années plus tard, on aménageait des bureaux sur la rue Saint-Jacques non loin du St Lawrence Hall, qui abritait la billetterie de la CPR et sera le site de l'édifice du Dominion Express.
La compagnie continuera de croître en étroite liaison avec la CPR. En 1937, elle comptera 8 828 agences réparties dans 21 pays. Elle aura aussi perfectionné un autre moyen d'accroître sa rentabilité : la sous-division de travail car on ne compte pas moins de 67 catégories différentes d'employés subalternes dans cette entreprise. L'ancien consultant de la CPR, Frédéric Winslow Taylor, le créateur de la gestion scientifique, aurait de quoi être fier.
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