En 1849, les frères Louis et Jean-Baptiste Renaud sont associés comme marchands de grains, de farine et de provisions depuis un an. Avec un fonds de société qui dépasse 7 300 £, les deux partenaires sont établis respectivement à Montréal et à Québec. À Montréal, leurs bureaux et entrepôts se trouvent dans les entrepôts Bouthillier situés à la pointe à Callière.
En dépit de quelques revers, notamment une aventure à Halifax qui entraînera une perte de 2 000 £, la firme connaîtra un fort succès durant les années 1850. Lors d’un règlement de comptes en 1850, les profits atteindront presque 9 000 £, trois ans plus tard ils dépasseront 19 000 £ et en 1856, alors que la société entre les frères sera dissoute, les bénéfices égaleront 87 950 £. La réussite de la compagnie sera, semble-t-il, basée sur la libéralité du crédit accordé à ses fournisseurs, des marchands de campagne pour la plupart, dont plusieurs deviendront ses agents pour l’achat des céréales. L’envergure des affaires de L. Renaud & Frère sera tel que ces derniers monopoliseront en quelque sorte le commerce de grains au Québec.
À compter de 1856, la firme, de concert avec le négociant John Young, pratiquera un commerce plus ambitieux. Des grains achetés à Chicago, Milwaukee, New York et Portland seront livrés en de telles quantités en Grande-Bretagne et en France que, selon un chroniqueur, L. Renaud & Frère rivaliseront avec les plus puissantes maisons anglaises et américaines pendant quelques ans. Pour certaines années, le chiffre de leurs transactions tant au Canada qu’à l’étranger excédera 24 millions de dollars. À la même époque, et sans doute grâce à son succès dans le commerce de grains, Louis Renaud se lancera en son nom propre dans d’autres projets, notamment dans un commerce de faïence, de porcelaine et de verrerie avec John L. Cassidy en 1860, et dans la fondation de la Merchants’ Bank en 1863. Bien que la guerre de Sécession aux États-Unis (1861-1865) stimulera encore davantage les affaires de L. Renaud & Frère – dans une seule transaction, les nordistes achèteront 1 million de boisseaux d’avoine semble-t-il – l’entreprise sera plus vulnérable aux mésaventures.
Un tel revers se produira au milieu des années 1860, alors qu’une conjoncture défavorable – quelques malheureuses transactions aux États-Unis, un lourd endettement envers la Banque de Montréal, une importante baisse dans le prix des grains et la dépréciation du dollar américain après la guerre de Sécession – ébranlera le crédit de la société. En dépit des pertes énormes, Louis Renaud réussira tout de même à régler tous les comptes de la firme envers ses créanciers en se conservant « une modeste aisance ».
Élu conseiller législatif pour la première fois en 1856, Louis Renaud sera réélu par acclamation en 1864 puis nommé au Sénat trois ans plus tard au moment de la Confédération. Il prendra sa retraite à Sainte-Martine, dans le district de Beauharnois, où il décédera en 1878. Lors des funérailles de Renaud, comme marque de respect, les marchands de la rue Notre-Dame, de la rue Bonsecours à l’église Notre-Dame, fermeront leurs magasins lors du passage de son cortège funèbre. |