Après une longue et distinguée carrière militaire, Charles Lemoyne de Longueuil assume d'importantes responsabilités en 1725. Il est alors âgé de 68 ans. Il a succédé à Claude de Ramezay au poste du gouverneur de Montréal en 1724, à peine une semaine avant la mort de Claude-Élisabeth Souart, son épouse depuis 43 ans. Au printemps 1725 le gouverneur Vaudreuil lui confie une double mission auprès des Iroquois : empêcher l'établissement d'un fort anglais à Oswego et obtenir la permission d'ériger une redoute à Niagara. Fils adoptif des Cinq-Nations depuis 1694, Longueuil utilise son influence avec succès et revient à Montréal en septembre. Il ne séjourne que brièvement dans sa grande maison de la rue Saint-Paul (site du Marché Bonsecours actuel), avant de se diriger vers Québec où il s'entretient avec le gouverneur mourant. Au décès de ce dernier en octobre, Lemoyne devient gouverneur intérimaire, espèrant être nommé gouverneur en titre. Mais à cause du népotisme pratiqué par Vaudreuil et sa femme (native du Canada), le ministre de la Marine refuse de placer un Canadien à la tête de la colonie.
Tout au long de sa carrière, Longueuil combine ses forces naturelles avec des alliances judicieuses. Fils de l'important négociant Charles Lemoyne, Longueuil était éduqué en France et devint page d'un maréchal parent du gouverneur Frontenac. En 1681, résidant toujours en France et ayant obtenu le grade de lieutenant, il se mariait avec Claude-Élisabeth Souart, la nièce du sulpicien Gabriel Souart, ancien supérieur du séminaire de Saint-Sulpice à Montréal. De retour en Nouvelle-France en 1683, il se distinguait pendant la guerre iroquoise des années 1684 à 1699 à un point tel que le roi le faisait baron de Longueuil en 1700 - le seul Canadien d'origine à recevoir un tel honneur en Nouvelle-France. Envoyé en ambassade auprès des Iroquois plusieurs fois pendant la guerre de succession d'Espagne (1702-1713), il réussissait à maintenir leur neutralité. Propriétaire des seigneuries de Longueuil et de Beloeil depuis 1684 et 1711 respectivement, il recevait des augmentations importantes à ses seigneuries en reconnaissance de services rendus pendant la guerre. Avec la paix, il poursuivit ses missions au pays des Cinq-Nations pendant les années 1710, « abandonnant volontiers sa famille et toutes ses affaires pour mesnager ces nations ». Il recommandait l'établissement d'une redoute à Niagara afin de protéger les intérêts français dans la région des Grands Lacs.
Nommé gouverneur de Trois-Rivières en 1720 puis gouverneur de Montréal en 1724, il deviendra gouverneur intérimaire de la Nouvelle-France entre 1725 et 1726. À la suite de ces années mouvementées, il prendra sa retraite à sa seigneurie de Longueuil où, en 1727, il convolera avec Marguerite Legardeur de Tilly, veuve à deux reprises. Son fils Charles, militaire de carrière qui deviendra gouverneur de Montréal à son tour, lui succèdera comme deuxième baron de Longueuil. |