En 1725, le vieux gouverneur Philippe de Rigaud de Vaudreuil est âgé de plus de 80 ans. Il a joui d'un pouvoir incontesté dans la colonie depuis son retour de France en 1716, mais depuis deux ans il se trouve au centre de deux controverses : son implication directe dans le commerce des fourrures et son hésitation à assister la colonie de Louisiane contre les Renards. Au mois de mars, il est à Montréal où il surveille les préparations d'une mission qu'il confie à Charles Lemoyne de Longueuil : obtenir des Iroquois le droit d'ériger une redoute à Niagara. Mais à partir du 10 mai, il tombe malade. Il demeure jusqu'au mois d'août dans son imposante résidence construite en 1723-1724 sur la rue Saint-Paul (actuellement, la partie sud de la place Jacques-Cartier), mais il est incapable de remplir ses fonctions. Il retourne à Québec et y décède le 10 octobre. Sa femme, Louise-Élisabeth de Joybert, de retour en la colonie depuis 1720 sauf pour une brève absence en 1723-1724, quittera définitivement la Nouvelle-France.
Officier militaire de carrière, Philippe de Rigaud de Vaudreuil est arrivé au Canada en 1687 pour commander les troupes de la Marine. Le 21 novembre 1690, à l'âge de 47 ans, il épouse la jeune Louise-Élisabeth de Joybert, fille de feu Pierre de Joybert de Soulanges et de Marie-Françoise Chartier de Lotbinière. Par cette union Vaudreuil s'associe à l'une des plus importantes familles de la Nouvelle-France, les Chartier de Lotbinière. Née à la rivière Saint-Jean, en Acadie, en 1673, Louise-Élisabeth est éduquée chez les ursulines de Québec alors que sa mère tente d'élever sa famille avec la pension qu'elle obtient à la mort de son mari. Le vieil officier et la jeune demoiselle auront 12 enfants et en 1709, Louise-Élisabeth partit pour la France afin de protéger les intérêts de son mari et de mousser la carrière de ses enfants.
Au décès du gouverneur Louis de Buade de Frontenac en 1699, Louis-Hector de Callière, gouverneur de Montréal et plus habile politicien et diplomate, lui succèda. Vaudreuil dut donc se contenter du gouvernement de Montréal où il loua une maison en 1700. Il occupa cette propriété à titre de locataire pendant 20 ans. Son affectation à cette ville lui permit toutefois de se familiariser davantage avec les rouages du commerce des fourrures. Il se fit concéder la seigneurie de Vaudreuil en 1702 et l'année suivante y établit un comptoir de traite sur l'Île-aux-Tourtes. Comme d'autres administrateurs français et officiers militaires, il s'impliqua dans le commerce des fourrures afin de réparer sa fortune.
Gouverneur de Montréal entre 1699 et 1703, il est devenu gouverneur de la colonie par la suite, un poste qu'il occupa, à l'exception d'une absence de deux ans de 1714 à 1716, durant le reste de sa vie. Sous Vaudreuil, débuta la construction des fortifications en pierre autour de Montréal et des forts furent établis à Niagara, Toronto, Quinté et Oswego afin de contourner l'expansion anglaise et de renforcer les liens économiques avec des alliés amérindiens. Quant à ses six fils, les efforts persistants faits avec sa femme pour leur obtenir de l'avancement dans le service du roi, seront largement récompensés. Chacun occupera des postes importants dans la marine ou dans l'armée, y compris Pierre et François-Pierre, respectivement gouverneur du Canada et gouverneur de Montréal à la fin des années 1750. |