En 1681, année de recensement, la Congrégation de Notre-Dame, communauté de filles séculières enseignantes, compte 18 sœurs. Marguerite Bourgeoys, la fondatrice, a alors 61 ans. Elle vient de faire un troisième voyage en France, séjour qui l'a déçue puisqu'elle n'a pas encore pu obtenir la pleine reconnaissance de sa congrégation en tant que communauté religieuse, alors que les lettres patentes civiles avaient été obtenues de Louis XIV en 1671. La communauté dispose en 1681 d'un bâtiment en pierre construit en 1669 à l'emplacement de la première école ouverte par Marguerite en 1657, rue Saint-Paul, en face de l'Hôtel-Dieu (près de l'actuel boulevard Saint-Laurent). Sept pensionnaires de « bonne famille » y habitent en 1681 avec les soeurs. En tant que supérieure générale, mère Bourgeoys continue à suivre les autres œuvres de la communauté, dont l'ouvroir de la Providence à la métairie de la pointe Saint-Charles, hors de la ville, créé pour recevoir et former les jeunes filles à marier arrivées de France. Les sœurs de la Congrégation s'éloignent aussi en direction de la montagne pour aller enseigner aux enfants amérindiens à la Mission fondée par les Sulpiciens. Elles s'occupent également des petites écoles ouvertes depuis peu dans quelques paroisses de la région, et même du côté de Québec. Toutes les biographies soulignent que l'enseignement gratuit destiné aux enfants modestes demeure toujours la préoccupation première de Marguerite Bourgeoys.
Parmi ses réalisations désormais concrétisés en 1681, elle peut compter la chapelle Notre-Dame de Bon Secours, un important lieu de pèlerinage pour les habitants de Ville-Marie, complétée et cédée à la paroisse en 1678 (on peut en voir aujourd'hui les fondations sous la chapelle reconstruite un siècle plus tard).
Née à Troyes en 1620, arrivée de France en 1653, à l'âge de 33 ans, alors que la survie même de Montréal n'était pas encore assurée, Marguerite Bourgeoys a donc derrière elle près de 30 ans d'activités fondatrices lorsque nous la rencontrons ici en 1681. L'essentiel de son œuvre est alors accompli.
En 1683, la fondatrice voudra démissionner mais un grave incendie qui détruira le couvent provoquera la mort de deux candidates à sa succession. Marguerite Bourgeoys demeurera à la direction de la communauté jusqu'en 1693. Un nouveau couvent sera construit entre 1684 et 1686 sur un vaste terrain situé entre les rues Saint-Paul et Notre-Dame. Une chapelle sera mise en chantier en 1693 et complétée en 1695, grâce à des fonds fournis par Jeanne Le Ber, qui vivra en recluse dans une pièce à l'arrière de la chapelle (Le couvent sera maintes fois agrandi et modifié jusqu'au 19e siècle, avant de disparaître au début du 20e pour l'ouverture du boulevard Saint-Laurent). En 1698, la fondatrice verra enfin sa Congrégation de Notre-Dame canoniquement érigée en communauté. Elle pourra alors prononcer ses vœux en même temps que ses compagnes, à 78 ans, deux ans avant son décès. Marguerite Bourgeoys sera canonisée en 1982 par le pape Jean-Paul II.
(Note: aux références bibliographiques indiquées plus loin s'ajoutent de nombreux autres ouvrages. Voir la bibliographie élargie de la section Documents, en utilisant le mot-clé « Bourgeoys» ) |