Parmi tous les marchands actifs à Montréal pendant la première moitié du XVIIIe siècle, la carrière de Alexis Lemoine dit Monière est probablement une des mieux connues grâce aux livres de comptes qu'il a laissés à la posterité. Natif de Trois-Rivières, Lemoine s'installait à Montréal pendant sa jeunesse. De voyageur agissant pour le compte d'autres marchands, Lemoine est devenu, vers 1715 à l'âge de 30 ans, un équipeur avec son propre magasin. À titre de marchand-équipeur, Lemoine dit Monière fournit en mai 1725 des marchandises (en ordre d'importance: couvertures et draps, armes et armements, vêtements, eaux-de-vie et outils et quincailleries) à quatre marchands-voyageurs qui font la traite des fourrures dans les pays d'en haut. Par la suite il s'occupe, sans doute, à la série de tâches reliées à l'expédition des pelleteries en France et à la réception des nouvelles marchandises de la métropole. Toutes ces opérations se font dans le magasin intégré à sa maison de pierre, à l'angle des rues Saint-Paul et Saint-Sulpice, toute proche de ce qui était alors le centre commercial de la ville.
Mais l'année 1725 se distingue des autres. Après avoir inventorié la communauté des biens qui existait entre lui et sa première femme, Marie-Louise Kimble (de nationalité anglaise, décédée en 1721), il épouse le 12 août Marie-Josèphe de Couagne. Par ce mariage, il s'afillie à une des plus riches familles marchandes en ville. Le nouveau couple, avec les quatre enfants du premier mariage, s'installe dans la maison de Lemoine. Cette dernière sera entièrement reconstruite et agrandie en 1731.
La carrière de Lemoine s'étendra jusqu'à la fin des années 1740. En moyenne anuellement, il fera trois équipements dont la valeur de chaque cargaison ne dépassera que rarement le seuil de 5 000 livres, ce qui donne un roulement de capital d'environ 10 à 15 000 livres par an. Bien que ce chiffre d'affaires ne place pas Lemoine au sommet des marchands, sa carrière peut quand même se définir comme « une honnête réussite ». |