Marie-Hélène Jodoin et Amable Jr Jodoin
Marie-Hélène et Amable Jodoin n’habitent pas le Vieux-Montréal, ils constituent toutefois un excellent exemple de cette bourgeoisie canadienne-française de la seconde moitié du XIXe siècle qui est très active dans le monde du commerce et de l’immobilier. Leurs activités sont variées et fortement concentrées dans le Vieux-Montréal. Bien qu’il soit difficile de retracer l’itinéraire exact de ce couple, certaines traces sont parvenues jusqu’à nous. Marie-Hélène Jodoin était la fille de Pierre Jodoin, un marchand bien nanti de Montréal, qui siégea durant un certain temps au conseil de la Banque du peuple. Il semble que Marie-Hélène hérita d’une somme importante de son père. Elle épousa Amable Jodoin Jr le 27 avril 1853. L’acte de mariage fut enregistré à la paroisse Notre-Dame et stipulait que la jeune mariée était mineure. On ne peut donc qu’évaluer l’année de sa naissance qui se situerait après 1833. Amable Jr, quant à lui, est né le 31 mars 1828.
Ce dernier exerça principalement le métier de marchand. On le retrouvait d’ailleurs en 1868 à l’emploi de N.W. Desmarteau et Jodoin, importateurs de tissus et grossistes en épicerie, commerce situé sur la rue Saint-Paul. Les propriétaires étaient fort probablement des proches de Marie-Hélène, cette dernière étant apparentée, par sa mère, à des Birs dit Desmarteau. En 1870, Amable Jr acheta de Gédéon Larocque une fonderie située à Longueuil, ses bureaux demeurèrent cependant dans le Vieux-Montréal, sur la rue Saint-Paul.
En 1871, Marie-Hélène Jodoin faisait construire une résidence cossue sur la rue La Gauchetière près de Berri. Ce quartier accueillait alors de nombreux membres de la bourgeoisie canadienne-française qui étendait ainsi peu à peu ses espaces résidentiels au nord du Vieux-Montréal jusqu’au-delà de la rue Sherbrooke. Cette très belle résidence, une des rares qui existe encore dans le quartier, a tout récemment été intégrée à l’ancien immeuble des HEC, rue Viger, pour former les nouveaux locaux des Archives nationales du Québec.
Les Jodoin se portèrent acquéreur de plusieurs propriétés dans le Vieux-Montréal. Même si les rôles d’évaluation et les différents plans indiquent que le propriétaire était Amable Jr, les actes notariés spécifient clairement que Marie-Hélène Jodoin était la propriétaire légale de ces immeubles. Ainsi en 1872, elle acheta de Victor Hudon un bâtiment sur la rue Saint-Paul (aujourd’hui le 8 rue Saint-Paul), bâtiment qui fut démoli pour céder la place à un nouvel immeuble (Édifice Jodoin). Les Jodoin furent aussi propriétaires d’autres immeubles, tous situés sur la rue Saint-Paul est : les actuels 84-88 Saint-Paul et 383-387 Saint-Paul. À l'endroit où s'élève aujourd'hui le récent immeuble du 110 Saint-Paul est s'élevait autrefois un édifice appartenant aux Jodoin.
Amable Jodoin Jr fut, durant un court moment, attiré par la politique et fut élu député libéral fédéral de Chambly en 1874. Il ne siégea à la Chambre des communes que le temps d’un seul mandat. Il décéda en janvier 1880 et rapidement la maison de la rue La Gauchetière fut vendue de même que la fonderie de Longueuil. Marie-Hélène déménagea alors dans la région de Beloeil d’où originait sa mère.
On ne connaît pas précisément la date de son décès, mais on sait qu’elle rédigea son testament en mars 1880 et qu’en septembre 1888, la succession Marie-Hélène Jodoin (composée des trois enfants du couple) vendait l’immeuble du 8 rue Saint-Paul. Cette courte histoire du couple Jodoin est certes incomplète, mais elle dresse néanmoins un portrait intéressant de cette bourgeoisie qui a utilisé le commerce et la propriété foncière pour assurer sa prospérité financière.
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