Un des rares francophones parmi la haute-bourgeoisie canadienne, voilà comment on peut d’emblée présenter Rodolphe Forget. Son influence touche autant les milieux d’affaires que le monde politique. En 1915, Rodolphe Forget est président de la Quebec Railway, Light, Heat & Power Compagny et vice-président de la très importante Montreal, Light, Heat & Power Co. Ses activités ne se limitent toutefois pas à ces seules entreprises. Il est membre de nombreux conseils d’administration comme celui de la Compagnie de navigation du Richelieu et d’Ontario de laquelle il fut président durant un certain temps. Sous l’influence de Forget cette compagnie sera d’ailleurs le maître d’œuvre du manoir Richelieu à Pointe-au-Pic dans la région de Charlevoix. Forget est aussi, depuis 1904, député à la Chambre des Communes de ce même comté de Charlevoix.
Rodolphe Forget joue bien son rôle de « millionnaire ». On dit qu’il multiplie da manière un peu désordonnée les œuvres philanthropiques, mais c’est surtout l’hôpital Notre-Dame de Montréal qui bénéficie de ses largesses. De 1906 à 1918, il aurait versé environ 250 000 $ à l’institution. Il accueille parents et amis dans une somptueuse résidence située rue du Musée à Montréal ou encore dans sa luxueuse villa de Saint-Irénée dans Charlevoix.
Rodolphe Forget est né en 1861 à Terrebonne. Dès l’âge de 15 ans, il entra au service de la maison de courtage L.J. Forget et Cie, fondée par son oncle Louis-Joseph Forget, lui aussi bien connu du monde financier canadien. En 1890, Rodolphe devenait associé de la firme de courtage, il y fut actif jusqu’en 1907. En 1890 toujours, il acheta des actions de la Compagnie royale d’électricité, compagnie dont il s’assura le contrôle en association avec, entre autres, son oncle Louis-Joseph.
Au début du siècle d’intenses négociations s’amorcèrent avec Herbert Samuel Holt de la Compagnie de gaz de Montréal en vue de procéder à une fusion afin d’éliminer la concurrence dans la vente et la distribution d’électricité à Montréal. De ces négociations naquit la Montreal, Light, Heat and Power Co. dont Holt assuma la présidence et Forget la vice-présidence. Ce dernier était reconnu comme un investisseur audacieux dont les activités étaient généralement couronnées de succès. On le surnommait même « le jeune Napoléon de la rue Saint-François-Xavier » faisant ainsi référence à la fonction de président de la Bourse de Montréal qu’il exerça de 1907 à 1909.
En 1909, fort de ses succès avec la Montreal, Light, Heat & Power, Forget étendit ses activités à Québec en achetant la Compagnie du gaz de Québec. Il créait en novembre de la même année la Quebec Railway, Light, Heat and Power Company, un consortium de compagnies de chemins de fer et de distribution de gaz et d’électricité. Forget tentait ainsi de s’assurer le monopole de distribution d’électricité à Québec, comme il le faisait à Montréal. La concurrence d'une autre compagnie québécoise, la Compagnie électrique Dorchester, sera féroce et après que cette entreprise sera devenue propriété de la puissante Shawinigan Water & Power en 1915, le consortium de Forget ne pourra résister et sera finalement absorbé en 1923.
Rodolphe eut une fille, Marguerite, de son premier mariage. En secondes noces, il épousa Blanche McDonald, la fille d’un personnage important du chemin de fer Intercolonial. Le couple eut trois fils et une fille, Thérèse, femme politique et féministe bien connue sous le nom de Thérèse Casgrain. Rodolphe décédera en février 1919 à l’âge de 57 ans. Il aura sans aucun doute laisser sa marque dans le monde des affaires canadien, autant par son audace que par son rôle important dans l’évolution de l’industrie hydroélectrique à Montréal et à Québec.
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