En 1849, Ann Tracey et Charles Wilson habitent une maison qui leur appartient, rue Craig (actuelle rue Saint-Antoine), à l'angle de la côte de la Place-d'Armes. Mariés depuis presque 15 ans, ils n'ont apparemment pas d'enfant. Catholique, le couple fréquente probablement l'église St. Patrick, ouverte tout près en 1847. Charles Wilson est un important négociant en quincaillerie d'importation. Sa société, Wilson & Couillard, est située rue Saint-Paul dans une maison-magasin, tout près de la douane (place Royale). Son associé, A. Couillard, habite sur place. Cette année, les Wilson n'ont pas été épargnés par les violentes émeutes auxquelles ont donné lieu la sanction du projet de loi visant à indemniser les personnes ayant subi des pertes lors des événements de 1837-1838, et qui causent le saccage et l'incendie du parlement. Comme celle de Louis-Hippolyte La Fontaine, ami de Wilson, la résidence familiale a été durement vandalisée au mois d'avril.
Au tournant des années 1850, Wilson est très actif sur la scène politique montréalaise. Il est d'abord élu conseiller puis nommé maire par ses pairs en 1851. C'est à ce moment que le marché Sainte-Anne, siège du parlement incendié en 1849, est reconstruit. En 1852, Wilson devient le premier maire à être élu par le suffrage des citoyens. Sous son administration, on déménage l'hôtel de ville au marché Bonsecours. Mais l'année est aussi tragique. Deux grands feux se déclarent. L'un, le pire des XIXe et XXe siècles réunis, détruit le quart de la ville (surtout les faubourgs), tandis que l'autre ravage le coeur du centre commercial, c'est-à-dire la rue Saint-Paul dans le secteur de la de la douane. La quincaillerie de Charles Wilson, et, par le fait même, le logement des Couillard y passent. C'est ainsi que c'est sous l'administration de Wilson que l'on étend à toute la ville la réglementation obligeant l'utilisation de la maçonnerie comme matériau de revêtement. Le conseil décidera également de la construction d'un nouvel aqueduc, projet auquel on pense depuis un certain temps. En 1853, Wilson est à nouveau réélu, Mais lors de la présence du prédicateur anti-catholique Gavazzi, au cours de laquelle orangistes et catholiques s'affrontent, les forces de l'ordre tirent dans la foule. Des journalistes accusent le maire d'en avoir lui-même donné l'ordre, ce qu'il niera avec vigueur. Il quitte la mairie la même année.
Tous ces événements n'empêchent pas le couple de poursuivre d'autres activités. Ann Tracey, devient propriétaire d'un terrain vacant, la maison-magasin qu'il y avait là ayant brûlée en 1852. Il s'agit du terrain de l'actuel 105, rue Saint-Paul Ouest, que le couple fait construire. En 1854, Ann rachète à son beau-frère, Edward Wilson, une série de magasins-entrepôts en cours de chantier rue Saint-Paul; il en reste toujours les immeubles jumeaux de part et d'autre du boulevard Saint-Laurent. Le couple réalisera d'autres projets. Il fera entre autres construire un autre élégant magasin-entrepôt, rue Notre-Dame (actuel 243-245 Ouest), en 1866. |